Scénario du RP : Arkady
Joueurs : Aëla, Asazir, Epione, Lulu, Pwesci, Vayne, Zoryynn
Novélisation du texte : Arkady

La route défile derrière la fenêtre du bus. Les gens sont montés à différentes gares routières. La dernière datant d’il y a déjà deux heures. Chacun sait qu’il reste encore au moins trois bonnes heures de route avant d’arriver à destination. Dans le bus tout est calme, certains somnolent, d’autres regardent leur téléphones, d’autres encore lisent un livre. Tout le monde semble plongé dans ses pensées. A travers la vitre, le soleil éclaire de ses derniers rayons la plaine qui semble s’étendre à l’infini autour de la route. La nuit approche.
Soudain le moteur du bus a un raté, puis un second. Circonspect, le chauffeur tapote sa jauge de réservoir puis blêmit quand l’aiguille tombe brusquement à 0. Un soupir de désespoir monte du bus alors que dans un dernier crachotement de moteur, le bus s’arrête. Dans leur malheur ils ont de la chance. A moins de 500m, le néon clignotant d’une station service attire le regard de certains passager. Le chauffeur descend du véhicule, ouvre la soute et en sort plusieurs bidons qu’il tend aux passagers. Puis il leur indique qu’il va falloir marcher jusqu’à la station pour remplir les bidons et revenir jusqu’au bus afin de faire le plein. Il demande qui se porte volontaire pour l’accompagner.
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Ils sont 7 à s’être portés volontaires pour accompagner le chauffeur jusqu’à la station. Chacun d’entre-eux s’équipe d’un bidon et les voilà en route. Lorsqu’ils arrivent à quelques mètres de la station, le groupe constate qu’à part le néon clignotant sur le toit, tout semble éteint. Heureusement, un lampadaire rouillé sur le bord de la route, fournit suffisamment de lumière pour voir les environs. Le chauffeur s’approche d’une des pompes, mais le cadran ne s’allume pas alors qu’il tire le pistolet à essence. Il tente sa chance sur la seconde pompe, même résultat. La troisième et la quatrième ne donnent rien également. L’un des passagers se penche à travers la vitre de la petite boutique accolée à la station, il ne semble y avoir personne. Impossible de repartir les mains vides, de toute façon, le bus ne pourra aller nulle part sans essence. Le chauffeur se tourne vers le groupe.
— Il doit y avoir un générateur de secours quelque part. Il suffit de le mettre en marche et le courant reviendra. Ensuite on pourra remplir ces bidons et déguerpir d’ici. Allez voir.
Chacun échange un regard avant de scruter les alentours. Une vieille remise se trouve à une dizaine de mètres sur la droite. Elle semble tout aussi déserte que le reste de l’endroit. De loin, on peut apercevoir une grosse grille en fer rouillée et un cadenas tout aussi rouillé qui verrouille la porte de la remise. La porte de boutique, juste à gauche, semble aussi verrouillée. Mais à travers les fenêtres, il leur semble apercevoir un faible éclat lumineux dans un des couloirs. Personne ne semble trop savoir quoi faire.
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Laissant le chauffeur de bus avec les bidons au niveau des pompes, un premier groupe décide de se diriger vers la boutique. Epione, qui ouvre la marche, arrive le premier au niveau de la porte. Il pose sa main sur la clenche et tente d’ouvrir mais la porte est effectivement verrouillée. Ramassant une pierre, il jette cette dernière contre la vitre de la porte, mais à part une très légère rayure rien ne se passe. A croire que le verre est blindé.
Aëla, qui l’a accompagné, sort de sa poche quelques petits outils de serrurier dont elle ne se sépare jamais. Avec un clin d’œil à Epione, en en tour de main, elle déverrouille la porte, laquelle s’ouvre sans un bruit. Avec précautions, suivi de Lulu qui les accompagne, ils entrent dans la boutique. De ce qu’ils peuvent en voir grâce à la lumière du réverbère extérieur, l’endroit ressemble à une boutique de station essence classique. Un comptoir, avec la caisse et le terminal d’activation des pompes, une zone de présentoirs avec divers snacking, lecture, petits matériels électroniques et tout ce qu’on peut trouver dans ce genre de lieu. Sur leur droite, un couloir duquel émane une très légère lumière.
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Zoryynn ouvre la marche alors que derrière lui, Pwesci, Asazir et Vayne le suivent avec précaution. Arrivés devant la lourde grille de la remise, ils essayent en vain de faire sauter le cadenas ou la chaîne, mais malgré leur degré de rouille et divers craquement les deux résistent. Les quatres compagnons tentent une dernière fois de tirer de toutes leurs forces en synchronisation mais doivent se rendre à l’évidence, ils ne sont pas assez forts.
Pwesci plonge alors la main dans sa veste et en sort un pistolet. Devant le regard surpris des trois hommes, elle les rassure en leur indiquant qu’elle est une militaire en permission et que cette arme, en plus d’être tout à fait légale, est enregistrée. Puis, elle les fait reculer, vise posément le cadenas et tire. Le coup de feu résonne étrangement dans le silence alentour. Pweci a juste le temps de voir le cadenas sauter et la chaîne tomber au sol avant que l’ampoule du réverbère n’éclate et ne plonge l’ensemble de la station dans le noir complet.
— C’est pas moi, lâche Pwesci précipitamment.
Avant que ses camarades d’infortune ne puissent répondre, un éclat de lumière éclaire brièvement la scène, puis se coupe.
Revient, puis se coupe.
Revient, puis se coupe.
Dans un beau synchronisme, tout le groupe lève la tête vers le néon clignotant de la station qui lui fonctionne encore. C’est désormais le seul point lumineux aux alentours. Asazir s’approche de la grille et d’un geste la pousse. Dans un grincement de tonnerre, elle tourne sur ses gonds. Profitant du clignotement du néon, chacun à le temps d’apercevoir tout un tas de matériels divers rangés dans des casiers et sur des étagères rouillées à droite. Dans le fond, un léger bourdonnement se fait entendre.
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Le coup de feu résonne comme un coup de tonnerre et fait sursauter Lulu, Aëla et Epione. Alors qu’ils s’apprêtent à se précipiter dehors pour voir ce qui se passe, tout devient noir.
Un éclat lumineux vient soudainement percer la nuit, avant de disparaître.
Puis de revenir.
Puis disparaît à nouveau.
Lulu, qui se trouve encore juste à l’entrée, indique d’un geste du doigt le néon qui clignote juste au-dessus de leurs têtes. De l’autre côté des pompes, entre deux éclats de lumière, Epione aperçoit brièvement Pwesci ranger son arme. Cette dernière croise son regard et lui lance un petit sourire d’excuse et une dénégation de la tête. Epione soupire, secoue la tête et retourne dans la boutique. Il échange un regard avec Aëla et Lulu et leur explique brièvement d’où vient le coup de feu. Que doivent-ils faire maintenant ?
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Laissant Pwesci et Asazir se diriger vers le fond de la remise, Zoryynn et Vayne profitent de la faible lueur clignotante du néon pour fouiller les lieux. Les caisses et étagères ressemblent à une vraie caverne d’Ali-Baba. Malheureusement, une grande partie du matériel est, soit non fonctionnel, soit solidement cadenassé. Zoryynn s’apprête à baisser les bras lorsqu’il parvient finalement à forcer un tiroir dans lequel il trouve deux lampes de poche de petit format.
Plein d’espoir il pousse les boutons…
Rien.
Ouvrant le compartiment à piles, il découvre que celui-ci est vide. C’est à ce moment que Vayne le rejoint. Voyant ce que tient son compagnon d’infortune dans les mains, il retourne vite fait vers une des étagères qu’il vient de fouiller. Zoryynn l’entend farfouiller quelques secondes puis le voit revenir avec un grand sourire et une double paire de piles. Les deux hommes insèrent les piles dans les lampes et un rayon de lumière apparaît. c’est faible, mais toujours plus éclairant (et régulier) que le néon clignotant. Satisfaits de leur découverte, Vayne et Zoryynn se hâtent de rejoindre Pwesci et Asazir.
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Ces deux derniers n’ont pas pris le temps de fouiller. Attirés par le bourdonnement du fond de la remise, il se sont approchés de l’endroit. Malheureusement pour eux, la faible lumière du néon n’éclaire quasiment plus rien à cette distance. Il leur faut donc avancer à petit pas, guettant le moindre éclat lumineux pour se diriger tout en évitant les nombreux câbles et autres bout de ferrailles qui se trouvent sur leur route. Plus d’une fois, ils manquent de trébucher sur un obstacle à peine visible mais arrivent finalement près d’une porte. Le bourdonnement vient de derrière.
Précautionneusement, Pwesci la pousse. Elle semble donner sur une sorte de petite cours, d’après ce qu’elle peut voir. Le bourdonnement s’y fait plus fort alors qu’elle s’avance dans la cour. Soudain, juste devant elle, un essaim de mouche s’envole, et le son disparaît avec elles. C’est à cet instant que Zoryynn et Vayne arrivent. Equipés de leurs lampes, ils ont pu marcher plus aisément à travers les obstacles et n’ont pas mis longtemps à rattraper les deux autres.
Alors qu’ils avancent à leur tour dans la cour, leurs deux rayons de lampes tombent sur le cadavre d’un chien de garde juste devant les pieds de Pwesci. Attaché au mur, l’animal semble visiblement mort de faim depuis de long jours. Ce sont les mouches qui, venant se repaître sur son cadavre, causaient le bourdonnement. Heureusement pour le groupe, la cour étant en plein air, l’odeur n’est pas trop forte. Éclairant les alentours de sa maigre lumière, Zoryynn finit par apercevoir la porte d’un autre bâtiment sur la droite. Visiblement, une seconde remise se trouve juste derrière la première. Vayne aperçoit à quelques mètres derrière le cadavre du chien un cabanon, trop grand pour être une simple niche.
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Décidant de rester ensemble, le second groupe, aidé par la très faible lueur du néon, commence à fouiller la partie magasin. Ils en profitent pour tenter d’activer les différents interrupteurs qui leur tombent sous la main, mais il ne se passe rien. Alors qu’ils fouillent le comptoir à petit électronique, ils finissent par tomber sur trois petites lampes de poche. Activant ces dernières, un léger rayon de lumière apparaît. C’est peu, mais au moins, il fait déjà moins sombre dans le magasin.
Alors qu’Aëla dirige son faisceau lumineux vers les caisses, elle sursaute violemment en apercevant une silhouette et lâche un petit cri. Les deux autres braquent aussitôt leurs lampes sur l’endroit, pour constater que le corps décharné de ce qui semble être le pompiste repose sur la chaise de comptoir, près du tableau de commande des pompes. Vu son état, il ne fait aucun doute que ce dernier est mort. Mais depuis combien de temps, et comment, impossible à dire. Lulu fait remarquer qu’il est étrange qu’il n’y ait pas d’odeur mais ne sait comment expliquer ce phénomène. Epione s’approche autant qu’il l’ose pour jeter un œil au tableau de commande et découvre avec joie que l’affichage indique “complet”. La station est pleine. Il ne leur reste plus qu’à trouver comment tout relancer.
Laissant le cadavre derrière eux, aidés de leurs faibles rayons de lumière, qui n’éclaire qu’à 3-4 mètres devant, ils se déplacent prudemment dans le reste de la partie magasin de la station. Divers objets traînent au sol, sans qu’ils ne parviennent à définir si ceux-ci ont été jetés ou sont tombés sous l’action d’un quelconque courant d’air. Une légère couche de poussière recouvre le tout. Ils ne l’avaient pas vu jusque-là, mais avec le faisceau des lampes, ils aperçoivent les volutes de poussières que chacun de leurs pas soulèvent.
Finalement ils arrivent à une intersection. Le couloir de droite est celui qu’ils avaient aperçu un peu plus tôt. D’un coude de ce couloir, une faible lueur s’échappe. En braquant sa lampe au sol, Epione aperçoit dans la poussière des traces de pas qui partent dans cette direction. Un panneau informatif à l’entrée du couloir de gauche indique la direction des toilettes et d’un local technique.
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Zoryynn et Asazir décident de se diriger vers la remise. Celle-ci n’est pas fermée et ils n’ont donc aucun mal à y entrer. Dans le coin gauche de la pièce, trône un vieux générateur de secours à essence et un bidon vide renversé se trouve à ses côtés. En observant la jauge de l’appareil, Zoryynn constate que réservoir à essence est vide. Le générateur n’a donc pas pu se mettre en route lors de la coupure du générateur principal. Il en informe Asazir, qui de son côté continue de fouiller comme il le peut grâce à la chiche lueur émise par la lampe de Zoryynn.
Soudain il aperçoit de nombreux bidons dans les étagères verrouillées autour mais ne saurait dire si ces derniers sont vides ou pleins. Ni une, ni deux, il sort de sa poche sa pince coupante fétiche, qui ne le quitte jamais, et commence à faire sauter le cadenas d’une étagère au moment où Zoryynn le rejoint. Alors qu’ils se penchent vers les bidons enfin libérés, les deux hommes entendent soudainement un bruit métallique dans leur dos. Se retournant vivement, Zoryynn balaie les lieux de sa lampe. Le faisceau tombe alors sur un ensemble de chaîne, suspendues au plafond, qui se balancent doucement en grinçant. Dans la remise, nul autre son que la respiration des deux hommes et le grincement des chaînes ne se fait entendre alors qu’ils réalisent qu’il n’y a aucun mouvement d’air dans la pièce qui justifie que celles-ci se soit mise à bouger.
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Vayne et Pwesci eux décident de se diriger vers le cabanon. Ils contournent le cadavre du chien avec précaution puis poussent la porte en bois. Celle-ci résiste un peu, mais elle cède assez vite sous la poussée combinée de deux personnes bien décidées à rentrer. Alors qu’ils pénètrent dans l’unique pièce, une forte odeur métallique les prend à la gorge. Vayne balaye la pièce de sa lampe, elle est vide, à l’exception d’une armoire électrique accrochée au mur du fond.
Alors qu’ils s’approchent tous les deux, ils constatent qu’un cadenas verrouille l’armoire. Se félicitant de toujours garder sur lui une petite trousse à outils, Vayne sort de sa poche une pince coupante et en un tour de main, sectionne le cadenas. Pwesci ouvre la porte de l’armoire et lâche un soupir frustré. Il y a une quantité phénoménale de disjoncteurs et de boutons dans cette armoire, quelques fils sectionnés également et les instructions sur l’intérieur de la porte sont en russe. Littéralement. La seule indication qu’elle parvient à comprendre est sur un disjoncteur indiquant “pompes” mais elle a beau le pousser, celui-ci revient aussitôt à sa position initiale. Vayne observe l’armoire, tout aussi perdu que Pwesci. Aucun des deux n’a la connaissance qu’il faut pour relancer le générateur rapidement ou même correctement.
Alors qu’ils tentent de pousser au hasard quelques boutons sans que rien ne se passe, un reflet sur le mur attire le regard de Vayne. Il y braque sa lampe pour voir un léger filet rouge couler le long du mur. Déplaçant sa lampe sur les autres murs, il constate que de nombreux filets semblables sortent d’un peu partout.
— Du sang, confirme Pwesci dans une grimace après s’être approché pour regarder.
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Aëla s’engage dans le couloir de droite, décidant de suivre les traces de pas au sol et la lumière. Alors qu’elle avance prudemment, il lui semble entendre au loin des murmures. Balayant de sa torche les murs autour d’elle, elle ne trouve aucune porte, ni accès. Seul le couloir s’étend devant elle. Alors qu’elle tourne à un coude, elle sursaute soudainement en apercevant une silhouette debout devant elle.
Deux battements de cœur paniqués plus tard, elle réalise que ce n’est que son reflet sur une porte vitrée. Au-dessus de la porte, un petit boîtier lumineux avec indiqué “exit” émet une faible lueur. C’est cette lueur qu’elle a aperçut à l’entrée du couloir. S’approchant de la porte, elle jette un œil à travers la vitre, éclairant comme elle peut de sa lampe l’autre côté. Il lui semble apercevoir quelques chaises et tables ainsi qu’un parasol. Sans doute une sorte de terrasse extérieure attenante à la boutique. Poussant la poignée de la porte, elle tente d’ouvrir celle-ci mais elle est verrouillée.
Sortant son attirail de sa poche, elle se penche vers la serrure. C’est alors qu’elle constate une large trace de sang, qui s’écoule depuis la serrure le long de la porte jusqu’au sol. Éclairant celui-ci, elle remarque une suite de traces de pas ensanglantés qui semblent repartir en sens inverse, depuis la porte vers le fond du couloir d’où elle est arrivée. En y réfléchissant bien, elle est sûre et certaine de ne pas avoir aperçu ces traces en venant. Alors qu’elle reporte son regard sur la serrure, les murmures se font plus fort autour d’elle.
Sans qu’elle ne puisse, ni en comprendre le sens, ni même savoir d’où ils viennent exactement.
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Lulu et Epione prennent la direction du couloir de gauche. Ils dépassent deux portes sur leur droite, dont les logos leur indiquent sans l’ombre d’un doute qu’il s’agit des toilettes. Sur leur gauche, une autre porte indique des douches. Continuant leur trajet, ils finissent par arriver dans un cul de sac, avec une ultime porte annonçant “local technique”. Epione tente de l’ouvrir, mais celle-ci est verrouillée.
Se reculant de quelques pas, il donne un grand coup de pied dans la porte. Cette dernière vibre mais ne cède pas. Observant plus précisément le chambranle de la porte, il lui semble cependant que celui-ci s’est légèrement tordu sous le coup. Se tournant vers Lulu, il fait signe à cette dernière de s’appuyer contre la porte, comme lui. Tous deux s’appuient avec force contre la porte, se reculent légèrement puis donnent un violent coup d’épaule. Un craquement se fait entendre et la porte cède. Emporté par son élan, Epione bascule dans la pièce et chute lourdement. Aussitôt Lulu se précipite auprès de lui pour évaluer les dégâts. Sortant des bandages de son sac en bandoulière, elle lui immobilise le poignet rapidement, lui indiquant que par chance celui-ci ne semble pas cassé mais juste fêlé. Lulu et Epione se redressent et inspectent la pièce.
Ici et là se trouvent divers seaux et balais ainsi que du matériel de nettoyage, mais ce qui attire leur regard c’est l’armoire électrique sur le mur de droite. S’en approchant, Epione l’ouvre pour observer les différents interrupteurs. Rapidement, il enclenche quelques boutons sur l’armoire et un léger bourdonnement de mise en tension se fait entendre. Au moment où Epione s’apprête à enclencher les différents fusibles pour tout relancer, ils réalisent qu’une très fine couche d’eau arrive de par la porte dans leur direction. Plus loin, venant visiblement du couloir, ils perçoivent le bruit d’une douche qui coule et quelques éclats de voix.
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Malgré les frissons de peur que le cliquetis des chaînes fait naître dans le dos de Zoryynn et Asazir, ils refusent d’abandonner. Avec rapidité et célérité, ils inspectent les bidons présents dans l’armoire qu’ils ont réussi à ouvrir.
Vide !
Vide !
Encore vide !
Toujours vide !
Alors que le désespoir les gagne, un léger clapotis dans le bidon que vient de saisir Asazir leur redonne espoir. Zoryynn inspecte rapidement la dose de liquide, il n’y a pas grand chose mais c’est déjà ça. Le bidon suivant, qui s’avère être le dernier de la pièce continent également encore un peu d’essence. Avec précaution, pour ne pas en perdre la moindre goutte, Zoryynn verse le précieux liquide dans le réservoir du générateur.
Asazir de son côté, après avoir réglé quelques vannes sur l’appareil, échange un regard plein d’espoir avec Zoryynn, puis appuie sur le bouton marche. Dans un bruit de tonnerre, qui couvre soudainement celui des chaînes, le générateur se met en route.
Et les lumières de la remise s’allument.
Sur l’écran d’affichage, les deux hommes peuvent lire “carburant insuffisant, autonomie pour 30 min, redémarrez générateur principal”. La lumière, bien que faible des néons, s’avère suffisante pour qu’ils réalisent qu’il n’y a de sortie que par là où ils sont arrivés. Sans attendre, alors que les chaînes se mettent à s’agiter et à cliquer de plus en plus, les deux hommes sortent.
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Essayant autant que possible d’oblitérer les traces de sang qui coulent le long des murs, Vayne et Pwesci tentent le tout pour le tout en appuyant sur tous les boutons qui leurs passent sous la main mais il ne se passe rien de probant. Pire, l’armoire électrique commence à grésiller et émettre quelques étincelles de mauvais augure. Soudain, dans un éclat lumineux, l’unique ampoule du cabanon s’allume.
Tentant sa chance une dernière fois, Pwesci pousse à nouveau le disjoncteur “pompes” qui cette fois reste en place. Alors que les étincelles se font de plus en plus fortes et que l’armoire menace de prendre feu, Vayne remarque que les coulures de sang sont de plus en plus importantes sur les murs et commencent à se répandre au sol en une grande flaque rouge. Sans perdre de temps, les deux compères sortent du cabanon pour tomber, dans la cour, nez à nez avec Zoryynn et Asazir qui sortent au même moment de la seconde remise.
— L’armoire électrique est en train de griller, annonce Vayne
— Le générateur de secours est autonome pour 30 minutes, faut se grouiller, réplique Asazir.
— Où est passé le cadavre ? s’interroge Pwesci jetant un froid sur le groupe.
Chacun tourne la tête vers le cadavre du chien. Enfin, l’endroit où aurait dû se trouver le cadavre du chien. Mais à part la chaîne, toujours fichée dans le mur, il n’y a plus rien. La seule lumière autre que les lampes dans la petite cour est émise depuis la porte du cabanon, depuis la porte de la remise du générateur et par la porte de la première remise qu’ils ont traversée, mais elles sont insuffisantes pour voir clairement l’ensemble de la cour. Pwesci remarque néanmoins dans le quatrième coin, une grille, que personne n’avait vu lors de leur premier passage. Elle semble donner sur l’extérieur de la station mais à cette distance, impossible de dire si elle est verrouillée ou non. Soudain, dans les ombres, un grognement se fait entendre, suivi d’un cliquetis de griffe sur le béton.
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Essayant au maximum de garder son sang froid, alors que petit à petit les murmures montent en puissance pour se transformer en hurlement, Aëla bidouille la serrure jusqu’à enfin entendre le clic lui annonçant que la porte est déverrouillée. Sans attendre, elle se précipite dehors et claque la porte derrière elle.
Le silence qui l’entoure aussitôt en est presque assourdissant. Alors qu’elle fait quelques pas sur la terrasse, une nappe de brouillard épaisse s’abat soudainement autour d’elle. Il n’y voit guère plus loin qu’à un mètre et sa lampe ne lui est pas d’un grand secours, n’éclairant que des ténèbres embrumées autour d’elle. Enfin, pas complètement sombre, puisqu’elle constate sur la gauche que par moment la nappe s’éclaircit, comme si quelque chose au loin clignotait. Elle s’avance de deux pas lorsque soudain la nappe de brouillard blanchit complètement comme si des lumières avaient été allumées autour, la visibilité n’est toujours pas bonne, mais l’ambiance plus “lumineuse” rassure un peu Aëla. Observant du mieux qu’elle peut les alentours, Aëla remarque que sur sa gauche le brouillard continue de “clignoter” comme si la lumière qui lui donnait sa luminosité avait des ratés. Sur la droite, le grand flou lumineux ne change pas d’intensité.
Le bruit d’un grincement dans son dos la fait se retourner. Le faisceau de sa lampe tombe alors que la poignée de la porte qu’elle vient de fermer. Celle-ci est en train de s’abaisser tout doucement. Pourtant, alors qu’elle éclaire la zone vitrée de la porte, elle ne voit personne derrière, juste une grande traînée de sang qui ressemble à s’y méprendre à la trace d’une main. Trace qui n’était pas là, lorsqu’elle a ouvert la porte.
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Voyant l’eau arriver dans la pièce, Epione se détourne de l’armoire électrique pour se précipiter dans le couloir et y jeter un œil. Rapidement, il remonte le couloir et la ligne d’eau jusqu’à arriver devant la porte des douches. L’eau passe clairement sous le seuil de celle-ci. En collant son oreille contre la porte, il entend le bruit de l’écoulement des douches, ainsi que quelques éclats de voix.
Il n’en comprend pas le sens direct, tout ce qu’il comprend c’est qu’une altercation a lieu dans la pièce. Une femme semble crier. A l’intonation de sa voix, elle semble même appeler à l’aide. Une autre voix, plus grave, dont il ne comprend pas non plus les mots, se fait entendre. Au milieu de tout ce charabia, il peut clairement entendre des bruits de lutte et de combat. Alors qu’il s’apprête à poser sa main sur la poignée de porte, un éclat lumineux dans le couloir attire son regard. Les lumières viennent de s’allumer, la station est relancée.
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Restée en arrière, Lulu prend le temps d’observer l’armoire. Heureusement pour elle, si elle réalise qu’elle n’aurait pas su comment mettre en tension l’armoire, elle se rend compte qu’activer les disjoncteurs de la station ne semble pas plus compliqué que remettre le courant chez elle. Elle enclenche donc les interrupteurs un à un : “caisse”, “tableau de commandes”, “lumière”. Au moment où elle enclenche ce dernier, l’unique luminaire de la pièce s’allume alors.
Quittant le local technique, Lulu reprend le chemin en sens inverse, allumant le couloir. Quelques ampoules éclatent alors, et d’autres clignotent étrangement, mais elle y voit suffisamment pour se déplacer. Très vite, elle arrive jusqu’à la première intersection. Toutes les lumières de la boutique sont allumées, même si certaines faiblissent et clignotent. Alors qu’elle s’étonne de ne pas avoir croisé Epione en revenant, elle constate soudainement que le cadavre du pompiste, qui se trouvait au niveau du comptoir, a disparu.
Au moment où elle fait cette constatation, elle ressent un froid glacial la traverser tandis que depuis le couloir où Aëla a disparu plus tôt, elle entend un raclement se diriger vers elle. C’est alors qu’elle constate sur sa droite une petite porte que personne n’avait vu à l’aller.
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Pwesci et Zoryynn se dirigent en vitesse vers la nouvelle grille découverte. Un cadenas bloque l’accès, mais sans hésiter Pwesci sort à nouveau son arme et d’un coup de feu bien placé le fait sauter. Rapidement, ils ouvrent les grilles et se précipitent en dehors de la zone. Aussitôt un terrible brouillard tombe autour d’eux, bloquant toute vue. Ils constatent alors qu’en s’éloignant de la station ils se sont également éloignés des lumières qu’ils avaient réussi à relancer.
Heureusement pour eux, Zoryynn a conservé sa lampe de poche. Elle n’éclaire pas grand chose, donnant simplement un éclat lumineux au brouillard mais sans permettre de le percer. Alors qu’ils hésitent sur la direction à prendre, ils aperçoivent tout autour d’eux de nombreuses silhouettes qui se rapprochent plutôt rapidement. Dans leur dos, le cliquetis se fait de nouveau entendre ainsi que le grognement.
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Aëla décide de partir vers la droite et les lumières. Au bout d’une quinzaine de mètres, le brouillard s’épaissit encore plus et elle peine à voir ne serait-ce que le bout de ses bras quand elle les tend devant. Alors qu’elle avance aussi vite et aussi prudemment que possible, elle constate que le brouillard commence à perdre de sa luminosité. Après quelques pas, il n’y a guère plus que sa lampe pour lui assurer encore un semblant de lumière.
Brusquement, elle butte contre une structure métallique. Il lui faut quelques secondes pour comprendre qu’il s’agit d’une voiture, visiblement à l’arrêt. Contournant celle-ci, elle tombe sur une seconde puis une troisième voiture. C’est alors qu’elle réalise qu’elle est sur un parking. Sans doute un parking à l’arrière de la station. Alors qu’elle contourne une quatrième voiture, une silhouette émerge du brouillard, quelques mètres devant elle et dans un hurlement strident fonce vers elle.
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Malgré le retour des lumières dans le couloir, Epione décide de prendre le temps d’intervenir et se précipite dans la pièce des douches. Au moment où il y pénètre, tout se fait silencieux et les lumières s’éteignent une bonne dizaine de secondes. Il fait quelques pas prudents dans la pièce à la lueur de sa lampe de poche, au moment même où la lumière revient. Avec surprise, il découvre que la pièce est vide.
Pas d’homme.
Pas de femme.
Aucune d’altercation.
Pas d’eau non plus, remarque-t-il en constatant que la pièce est complètement sèche.
Rien d’autre qu’une pièce avec trois cabines de douches alignées le long du mur, le tout parfaitement vide. Un claquement brusque le fait violemment sursauter et il découvre que la porte vient de se refermer derrière lui. Il tente de l’ouvrir, mais elle résiste. Il réalise alors que la température commence à baisser rapidement. Jetant un œil autour de lui, il remarque à mi-hauteur dans un mur, une large bouche d’aération. Elle semble suffisamment large pour y laisser passer un homme.
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Sans attendre de savoir d’où vient ce cliquètement, Vayne et Asazir se précipitent dans la remise par laquelle ils sont entrés. Là aussi les luminaires sont allumés. Enfin, il y en a un sur deux qui fonctionne, mais c’est suffisant pour y voir et éviter les obstacles qui traînent au sol. Alors qu’ils traversent au pas de course la pièce, ils réalisent soudainement que l’air s’est grandement rafraichit. En tout cas, il ne leur semble pas qu’il faisait aussi froid à l’allée.
Soudain, ils aperçoivent du coin de l’œil de nombreuses silhouettes qui se dirigent dans leur direction. Redoublant de rapidité, ils achèvent leur traversée de la remise et débouchent sans encombre au niveau de la station et des pompes.
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Lulu décide de ne pas se poser de questions. Ni sur la disparition du cadavre, ni sur l’origine des bruits. Au pas de course, elle traverse la boutique alors qu’un violent froid vient la frapper violemment. Pendant une fraction de seconde elle à l’impression qu’elle va geler sur place. Dans le même temps, il lui semble apercevoir une silhouette décharnée foncer sur elle. Sans perdre de temps, elle se jette sur la porte de la boutique et débouche sans encombre au niveau de la station et des pompes.
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Le chauffeur de bus regarde Vayne, Asazir et Lulu débouler chacun de leur côté avec surprise avant de leur indiquer les bidons vides à ses pieds et les pompes. C’est alors que les trois compagnons s’avisent que les pompes sont de nouveau en fonctionnement et que le chauffeur a déjà rempli 2 bidons. Jetant un coup d’œil, qui vers la remise, qui vers la boutique d’où rien ne semble sortir, ils attrapent chacun un bidon, se dirigent chacun vers une pompe et commencent à le remplir tout en restant sur leurs gardes.
— Faites vite, ordonne le chauffeur, j’aime pas l’ambiance ici.
Alors qu’Asazir achève de remplir le dernier bidon, l’air tout autour de station se rafraîchit soudainement et les lumières se mettent à clignoter de plus en plus vite. Le chauffeur attrape deux bidons et se dirige prestement vers la route par laquelle ils sont arrivés.
— Je me tire, vous devriez pas traîner non plus. Et oubliez pas les bidons.
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Emboîtant le pas au chauffeur, Vayne attrape deux bidons et quitte la station pour rejoindre le bus. Arrivé à celui-ci, le chauffeur sort son matériel et entreprend de compléter le réservoir avec ses bidons et les deux de Vayne.
— Je ne peux pas attendre les autres, je suis désolé. On les récupérera en passant.
Sans perdre de temps, les deux hommes montent dans le bus et le chauffeur met le contact. Avec un tressaillement, le moteur démarre, et le bus se remet en route en direction de la station.
A l’instant même où Zoryynn et Pwesci s’apprêtent à faire face aux silhouettes qui se rapprochent rapidement, à l’instant même où Aëla se jette dans la voiture la plus proche pour se cacher, à l’instant même où Epione pénètre dans la bouche d’aération pour chercher une sortie, à l’instant même où Asazir et Lulu restés en arrière se demandent si attendre était une bonne idée, une grande vague de froid envahit toute la station, l’air frémit brusquement puis se met à onduler comme lorsqu’une forte chaleur se dégage du sol, un bruit strident se fait entendre, de plus en plus fort, jusqu’à finalement stopper brusquement..
Lorsque le bus arrive quelques secondes plus tard au niveau de la zone de la station, ses passagers constatent sidérés que celle-ci à disparu. Il n’y a plus rien, rien que la plaine à perte de vue. Le chauffeur tourne la tête sidéré vers Vayne, avec une interrogation dans le regard. Lentement, Vayne acquiesce d’un simple signe de tête. Non, il n’y a aucun doute, ils sont bien là où était la station.
Mais elle, elle n’est plus là.
Pas plus que ceux qui sont restés dedans. Le cœur lourd, mais ne sachant que faire pour ceux qui se sont fait piéger dans une station fantôme, le chauffeur se remet en route. Avec un frisson, Vayne jette un œil en arrière alors que le bus repart. Il lui semble furtivement apercevoir un néon clignoter, mais l’impression fugace disparaît au premier clignement d’œil.
Lorsque des heures plus tard (et après un nouvel arrêt à une station tout à fait fonctionnelle), le bus arrive enfin à destination, chacun en descend, ne sachant pas vraiment ce qu’il s’est passé cette nuit-là, mais certain d’avoir échappé à un destin horrible, piégé à jamais dans une station qui n’existe que pour trouver de nouvelles âmes à avaler.