Biographie d’Elehora

Titre original : Cinq fois vingt ans

Je suis originaire de Verte-Motte, un petit village proche de la frontière Nord de Val-Boisé, où je suis née par une belle matinée de Hautzénith en l’an 370 de la 3ème Ère.

Très jeune, comme beaucoup de mes semblables Bosmers, j’appris à chasser au cœur des bois. L’art de la traque, le fait de ralentir ma respiration, de rester tapie dans l’ombre, d’attendre l’occasion de tir parfaite ne fût pas facile à apprendre tant j’étais impatiente et j’étais plus douée pour tirer avec rapidité qu’avec de la précision. Si ma soeur, Aurora, maîtrisa ce talent avec une certaine facilité, je dû pour ma part attendre une année de plus pour exceller dans ce domaine et rejoindre le groupe de chasseurs de notre clan.

Enfants, ma soeur et moi nous imaginions agents secrets assignées à la protection des thanes silvestres de Val-boisé. Que voulez-vous… Quand vous êtes élevée au sein de la Marche il est dur de ne pas avoir entendu parlé des Rôdeurs de Voileronce et de ne pas rêver à ce que l’on imaginait être leurs missions secrètes. Les bardes auraient ainsi chantés nos aventures dans toutes les tavernes de la Tamriel, c’est ainsi que l’on imaginait notre avenir. Mais ces temps étaient révolus, les Rôdeurs de Voileronce n’existaient plus depuis bien longtemps qu’à travers les légendes locales. À mesure que nous grandissions nos rêveries d’enfance laissèrent place à des préoccupations plus concrètes et … plus frivoles.

La Marche de la Camarde était l’une des rares régions, sinon la seule – à ma connaissance – à se situer à cheval entre deux provinces. Les terres de notre clan à Verte-Motte se situaient ainsi à la frontière Nord de Val-Boisé entourée par la province d’Elsweyr à l’Est et Cyrodill au Nord. Cette région aux mélanges culturels omniprésents nous forgea une expérience atypique et une force de caractère que seul les gens ayant vécus à la frontière peuvent comprendre. Au nord, un long fleuve, La Stride formait une frontière naturelle avec Cyrodill qui apportait à la fois commerçants et voyageurs en tout genre. Nous aurions pu apprendre des marchands cyrodiliens le travail, la diplomatie et le commerce mais nous nous tournâmes d’avantages vers nos voisins khajiits à l’esprit plus turbulent et sauvage.

Nous apprîmes très tôt à fumer le skouma, qui avait l’avantage d’être légal en Elsweyr, soit à quelques jours à peine de Verte-Motte. Si Val-Boisé était en paix, la région restait instable et, du fait de la proximité territoriale et des écarts menés par les elfes et les khajiits, les querelles y étaient courantes. Les khajiits, plus agités, étaient souvent à l’origine de déforestation ou de faits de banditismes. Quant aux bosmers, ils ne manquaient pas une occasion pour des représailles et il n’était pas rare que des raids soient menés par des groupes de jeunes elfes sur les plantations de sucrelune. À la frontière, le marché noir était un commerce lucratif à porté de main.

De Haut-Zenith à Soufflegive, nous profitions de la majestueuse ville-chêne de Falinesti qui prenait racine à cette époque de l’année à une dizaine de jours à peine de Verte-Motte. Nous quittions alors la tribu pour aller renforcer les rangs des chasseurs afin de nourrir la grande cité. Nous expérimentions dans les tavernes notre descente de jagga et participions aux fêtes qui rythmait la vie de la ville. L’automne se clôturait ainsi avec le majestueux départ de la ville mouvante, un spectacle inoubliable que nous ne rations jamais.

Nous occupions le reste de l’année en vadrouillant entre la Marche et Malabal Tor plus à l’Ouest prenant ainsi quelques distances avec nos voisins khajiits, ce qui n’était pas sans déplaire à notre clan. Nous avions alors pris contact avec un quartier général local de la Guilde des Guerriers pour qui nous avons commencé à réaliser quelques contrats qui consistaient à débarrasser des villages de créatures ou encore livrer à des marchandises en empruntant des routes dangereuses.

À l’aube de nos 20 ans nous avions ainsi commencées à parcourir les régions alentours et multipliées les expériences en tout genre. Le nom des soeurs “Ora” se fit ainsi connaître, jusqu’au jour où l’on nous convoqua au Palais d’Aysia alors que Falinesti occupait son site automnal.

La Marche étant une région assez turbulente, et on nous proposa d’assurer différentes missions diplomatiques pour assurer la protection de haut dignitaire lors de leur déplacement en ces terres. Notre connaissance de la région fut particulièrement utile et ces missions ne relevèrent pas d’une difficulté excessive pour ma soeur et moi. Cela dura un temps.

Si Aurora s’épanouissait complétement dans ces nouvelles tâches, pour ma part je trouvais (avec la naïveté dûe à mon jeune âge) que les escarmouches khajiits restaient rares et le mercenariat commençait à me manquer à mesure que les jours avançaient. Aurora s’était bien assagie mais tel n’est pas mon cas. Je rêvais toujours des fêtes de Falinesti et l’insouciance de cette époque me manquait.

C’est à cette époque de nos chemins se séparèrent, Aurora fût appelée à la capitale pour prendre en charge des missions plus importantes. De mon côté, je refusa l’offre et décida de prendre mes quartiers à Arenthia. Mes connaissances nouées avec des nobles suite à nos missions de protections diplomatiques me permirent de prendre contact avec de riches marchands de Cyrodill, du Val-Boisé et même de Elsweyr. L’emplacement à la frontière me permettait de proposer mes services à différentes compagnies marchandes qui recrutaient des mercenaires pour protéger leurs caravanes chargées d’alcool et de bijoux. Et croyez moi, il était beaucoup plus périlleux dans la région de protéger de l’alcool et des bijoux qu’un dignitaire local. Et cette perspective m’enchantait. Cette position géographique me permettait également d’intervenir avec une milice locale pour contenir toutes les petites vendettas frontalières qui sévissait à l’époque et tenir les bandits à distance des villages.

Puis, alors que les querelles s’amplifiaient, certains clans commencèrent à se rassembler des deux côtés de la frontière. Val-boisé se disait toujours en paix, mais dans La Marche cette paix avait toujours été précaire et fragile, et celle-ci prenait les allures d’une guerre. Au fil des ans, même les pillards et les bandits commencèrent à se faire rares à mesure que les escarmouches s’intensifiaient. Même la milice locale fut dissoute, n’étant plus d’une assez grande utilité dans ce contexte.

J’admirais Aurora et son ambition de voir Val-Boisé en paix et reconstruite, mais telle n’était pas ma vision des choses, seul la Marche comptait pour moi, m’enrichir certes mais aussi protéger mon clan. J’avais rêvé par le passé de voir le conseil tribal de Val-Boisé réunis mais quant à savoir qui de l’Empire, des Altmers ou des vrais ou faux héritiers Camoran devaient régner sur nos terres… Je préférais ne rien en penser. La Paix n’était que factice à mes yeux, je voyais jour après jour la situation empirer jusqu’au printemps de l’an 3E 396, qui marqua le début de la Guerre de Cinq Ans.

Si ma vie de mercenaire m’avait forgé une expérience concrète, car je puis dire que le chaos de la région y était propice, c’est bien la guerre qui m’endurcie. Je tairais ici cette période sanglante qu’il ne me tient pas à coeur de raconter. Il convient simplement de dire que j’attendis pendant quatre ans et neuf mois le retour d’Aurora pour défendre nos terres ancestrales mais que j’eu pour toute réponse un simple mot, qu’elle n’avait même pas pris le temps d’écrire de sa main. Elle se rendait dans les régions du sud-ouest de Val-Boisé pour participer à ce que l’on appela plus tard la Guerre du Détroit d’Azur.

Bien que Val-Boisé soit une province impériale, nous n’eûmes aucune aide de la part de l’Empire pour nous défaire de nos envahisseurs. Pendant pas loin de cinq ans, Val-Boisé subit les affres de la guerre. Ironiquement, reconstruire Val-Boisé était devenu encore plus concret que par le passé. La Marche fût à nouveau en Paix mais Val-Boisé avait perdu une partie de ses terres aux profits de nos cousins altmers de l’Archipel de l’Automne et des khajiits d’Elsweyr. La Marche elle-même était théoriquement devenue possessions territoriales d’Elsweyr suite à notre défaite mais les accords restèrent flous.

La région rendue ainsi définitivement instable redevint alors le paradis des bandits. Les guets-apens et pillages reprirent de plus bel, il était devenu commun de croiser un chariot éventré ou le corps d’un marchand malchanceux gisant dans un fossé. En parallèle les rancunes entre les clans n’avaient jamais été aussi intenses, et quand la haine devenait trop forte, il n’était pas rare qu’un village entier soit victime de pogrome.

J’appris plus tard qu’Aurora avait survécu à la guerre et qu’elle avait été nommée quelques années plus tard, Gardienne de la cité. En ces temps difficiles la protection de la capitale s’était vu renforcée, les régions plus frontalières avaient, elles, été laissées pour compte. L’Empire de Cyrodill faisait face à ses propres démons et n’intervint pas plus dans la reconstruction de Val-Boisé qu’il n’était intervenu dans les guerres.

J’atteignais alors l’aube de mes 30 ans. Ma réputation sortie tristement grandie de cette période de troubles où mes talents de mercenaire furent particulièrement sollicités. Je décidais alors de créer ma propre milice dotée de mercenaires triés sur le volet. Sous le nom des Eclaireurs, nous entamèrent une grande période de ménage pour limiter le brigandage sur le territoire et protéger les villages alentours. Pacifier la région restait utopique, mais nous tentâmes tout de même d’y instaurer une forme de sécurité.

Aurora pour sa part, sous l’influence d’un ancien mentor devenue responsable de la garde personnelle de l’Empereur, oeuvrait pour rapprocher l’Empire et Val-Boisé. Alors que la guilde locale des guerriers de Val-Boisé était dissoute, Aurora rejongnit la branche placée sous l’autorité de Cyrodill. Nos rapports à l’époque étaient particulièrement tendus, tant nos opinions divergeaient au sujet de l’Empire. Je la soupçonnais même à l’époque de souhaiter rejoindre la garde impériale, ce qui pour moi était de l’ordre de la trahison après l’abandon de l’Empire face aux guerres qui avaient ravagé nos frontières.

Finalement, des contrats lucratifs menèrent la milice que j’avais crée par delà les frontières de Val-Boisé et je passa de nombreuses années au sud de Martelfell. C’est alors sous le nom des « Rôdeurs » que nous officiions. Ces années d’aventures loin de ma terre natale me détachèrent quelque peu de mes racines. Politiquement affaiblie, Val-boisé vivait une période d’après-guerre particulièrement difficile.

En l’an 3E 433, l’assassinat de l’Empereur de Cyrodill secoua tout Tamriel. Notre faction répondit à l’appel aux Braves qui fut relayé dans tout le territoire et nous partîmes ainsi combattre l’Aube Mythique lors de ce qui fût par la suite connu sous le nom de la Crise d’Oblivion. Notre principale mission – et non des moindres – consistait à chasser les daedra des alentours de Kvatch. Nous fîmes tout ce qui était en notre pouvoir pour empêcher l’invasion de Tamriel par Méhrunes Dagon, et nombre d’entre nous moururent au combat pour contenir la menace. C’est avec la Guerre de Cinq Ans, l’une des période qui marqua le plus douloureusement ma vie.

La faction des Rodeurs se divisa après les événements de Kvatch. Chacun des survivants ayant besoin de penser ses plaies, aussi bien mentales que physiques. Je pris pour ma part la direction plus à l’ouest de la Côte d’or pour profiter d’une période plus reposante dans la cité portuaire de Cœur-Enclume. Sur place, je fus hébergée par des aristocrates à qui j’avais pu rendre de nombreux services par le passé. Cette période de ma vie fut l’une des plus paisibles que je connus et me permis de me reconstruire dans un environnement calme et agréable. Un luxe que mon train de vie ne m’avait jamais permis jusqu’ici.

À dire vrai, ce paradis verdoyant et cosmopolite si près de Val-Boisé mais si différent de la vie que j’avais pu mener dans La Marche me semble aujourd’hui encore n’avoir été qu’un rêve. Pour sortir un peu de cette inertie qu’était devenue ma vie, je prêtais occasionnellement main forte à la guilde des guerriers locale pour m’occuper de certaines menaces alentours comme les gobelins ou les minotaures qui ne manquaient pas dans la région. C’est ainsi que j’occupais alors ma vie de mercenaire à la retraite. Cette escapade qui ne devait durer qu’un mois s’éternisa bien plus longtemps.

Alors qu’Elsweyr avait repris son indépendance vis-à-vis de l’Empire, Val-Boisé restait politiquement instable. Déçue par l’Empire j’espérais que nous suivrions la même voie que nos voisins Khajiits mais il n’en fut rien. Ma soeur, avec qui j’avais eu des contacts plus réguliers au cours des années qui précédaient, m’annonça des nouvelles inquiétantes selon lesquelles des agents du Thalmor oeuvraient en Val-Boisé, formant des alliances avec certaines factions bosmers.

Que cette ancienne et puissante faction Aldmer soit de nouveau active n’auguraient rien de bon. Je repris alors la route de ma terre natale pour y retrouver mon clan et les membres de ma famille qu’il me restait, dont Aurora. Ma sœur resta très évasive sur les informations en sa possession, mais il n’était pas dur de comprendre qu’elle avait des contacts au placé au sein de l’Empire. Je supposais même qu’elle reçue des informations des Lames elle-mêmes. En était-elle devenue un membre à part entière, je ne le su jamais, mais cette barrière de secrets rendait nos rapports difficiles.

Le Thalmor pris finalement le contrôle de l’Archipel de l’Automne en 22, renversant les rois et reines légitimes au pouvoir. Nous prîmes alors la dure décision d’envoyer notre famille et les membres du clan qui souhaitaient se joindre à eux à Sentinel. J’avais gardé des contacts dans la région et ils nous semblaient plus raisonnable au vu des circonstances d’agir ainsi. Mais c’était avant tout l’avis d’Aurora de fuir, et non le mien. Cependant, malgré son silence, il me suffisait de regarder ma soeur pour comprendre la gravité de la situation. Les intuitions d’Aurora, quelqu’en étaient les sources se révélèrent justes.

Des rebellions éclatèrent en Val-Boisé, des clans bosmers s’affrontèrent entre-eux pour des raisons obscures. Finalement cinq ans plus tard, le Thalmor fit un coup d’état, et c’est ainsi que notre province rejoignit ainsi l’archipel de l’Automne pour former le Domaine Aldmeri, pour la troisième fois dans l’Histoire de notre peuple.

Aurora dût aussitôt quitter la région. Fidèle à l’Empire depuis toujours, il était beaucoup trop risqué pour elle de rester. Elle me supplia de la suivre mais il était hors de question pour moi de se joindre à sa cause. Je n’appréciait ni l’Empire, ni le Thalmor et avait bien conscience que Val-Boisé, anéanti par ses années de déroute politique, ne saurait se défaire de l’un ou de l’autre. Je décidais donc de rester afin de me rendre utile d’une manière ou d’une autre. Espérant naïvement que nos cousins Altmers sous l’emprise du Thalmor réagiraient… Ma principale inquiètude était de voir Val-Boisé, et la Marche plus particulièrement, devenir une région tampon entre le Domaine Almedi et Cyrodill. Une région qu’une guerre entre ces deux belligérants anéantiraient, une annexe servant de pied à terre au Thalmor dont les intentions restaient floues. La réalité allait s’avérer bien plus sombre.

L’Empire inutile mais encore très présent dans La Marche fit de notre région une cible prioritaire pour le Thalmor. Reive, un Drémora au service de Boéthia, fût envoyé afin de « pacifier » la Marche. Lui et son groupe de fidèles de Boéthia furent lâchés dans la région et le peuple de La Marche connut alors ses heures les plus sombres. Si la guerre peut s’avérer cruelle, il n’est plus impitoyable bourreau qu’une secte d’adorateurs de Boéthia pour rendre la justice.

Je fus présente le jour où Folbosque, un village bosmer non loin de Verte-Motte fut rasé en une nuit. Ses habitants furent condamnés à mort, jugés collaborationnistes et exécutés le soir même faisant s’affronter dans des duels à mort femme, enfant et mari. Le village, lui fût brulé.

Je fis rappeler la milice et de manière général tous les mercenaires et guerriers qui auraient à coeur de défendre la région, mais peu avait à coeur les interêts de Val-Boisé et nul or au monde ne pouvait convaincre les plus courageux d’affronter Reive et sa troupe de fanatiques. Je continua de mener cette emprise folle pendant près d’un an, sauvant quelques villageois dans les villages, organisant l’exode de la population mais Reive était impitoyable et frappait à nouveau sans que nous puissions nous préparer ou même réagir.

Trois de mes anciens compagnons des Rôdeurs me rejoignirent pour former une résistance dans la Marche et quelques combattants moins aguerris également. C’était peu, mais le nombre n’avait que peu d’importance à mes yeux tant la haine m’animait de rendre justice au nom du peuple bosmer. Je tentais également de me rassurer, pensant qu’il ne pouvait y avoir mieux que des guerriers ayant chassés des daedra à Kvatch pour affronter le Thalmor. Moi-même adoratrice d’Hircine, j’étais décidée à faire comprendre qui sur ces terres était la véritable proie et qui en était le chasseur.

Malheureusement, si Elrindil et moi même n’avions pris que plus d’expérience après les 40 ans qui nous séparaient des événements de Kvatch, il n’en était pas de même pour nos autres compagnons dont les années avaient rendu les mouvements plus lourds et moins sûrs. Une année particulièrement difficile s’écoula où nous étions tour à tour les chasseurs ou les proies. Les grottes, les ruines isolées et les collines n’avaient pas de secret pour moi et nous prodiguait un avantage certain. Mais plus nous réussissions à gagner du terrain plus Reive semblait y prendre du plaisir, se vengeant sur les villages alentours pour nous faire payer notre révolte.

Les morts s’accumulaient, les cachettes devenaient rares et peu de villageois étaient enclins à nous aider au vu des répercussions qu’une telle prise de risques pouvaient entraîner. Ne sachant pas si nous arrivions réellement à aider la Marche dans ces conditions et voyant la présence du Thalmor se renforcer, nous dûmes abandonner. Elrindil et moi même avions de la famille en exode dans la région de Sentinel à Martelfell, nous fîmes donc le choix de prendre la route vers le Nord pour retrouver nos proches.

Pin It on Pinterest